Un vol en 4 phases vers le club des 100 km
Nous sommes le samedi 28/05/2022.
J’arrive sur le décollage de Saint-Marc vers 10h00, le vent est fort, quelques biplaces sont déjà en l’air et montent bien.
Je temporise un peu avec les pilotes présents, le ciel n’est pas encore allumé de cumulus notamment au sud.
Vers 11h00, le vent semble baisser un peu, les biplaces s’enchaînent, des nuages se forment derrière le déco mais disparaissent vite. Nous commençons à nous préparer…
1ere phase
Décollage à 11h25, suivi d’un ratissage en règle, nous sommes 4 pilotes en l’air et 3 biplaces, les quelques bulles sont vites marquées mais pas vraiment exploitables. 15 minutes plus tard, nous commençons à descendre sous le déco, les biplaces posent, restent JP et moi qui nous battons. Je commence à remonter sur une petite zone de 100m de large sous le déco. Je remonte petit à petit en grattant au mieux et trouve ma porte de sortie dans un 3m/s bien établi en repassant au-dessus du déco. J’arrive à 1000 m, un peu en dessous du nuage, en 10 minutes après mon point bas.
Ensuite direction, le prochain nuage… c’est mou, je n’arrive pas à atteindre les barbules. Je me laisse donc dériver dans un thermique faible jusqu’à pouvoir atteindre Athis de l’Orne. Je trace ensuite au-dessus de la ville en me décalant de mon axe de dérive pour changer de rue, en espérant trouver un thermique sous le vent de cette commune. Je retrouve bien quelque chose, encore trop faible. Même option, je me laisse dériver en essayant d’atteindre Flers.
Mes options : me refaire derrière Flers, ou poser au sud de Flers et aller manger un morceau, il est déjà 12h30 ! C’est la première option qui s’offre à moi en interceptant un thermique plus conséquent qui me remonte à 1100m. Les plafonds augmentent !
Je détecte un schéma récurrent : je me dirige dans l’axe de nuages, qui dégonflent à mon arrivée, me laissant uniquement un thermique tout mou.
2ème phase
Maintenant qu’il n’est plus question de faire une pause déjeuner, je change désormais de stratégie : rester haut pour rester longtemps en l’air.
J’enroule donc tout ce qui monte quitte à faire seulement quelques centaines de mètres.Je réussis ainsi à parvenir jusqu’à Domfront, toujours en suivant les barbules qui se font et se défont au-dessus de moi sans jamais les atteindre.
3ème phase
Le ciel au sud de Domfront est bleu, je continue d’avancer à tâtons, mais je suis toujours en retard sur les ascendances. La vitesse des thermiques a clairement augmenté, changement de stratégie : je me jette vers le bleu sans indicateur au préalable.
Et ça paie : nouveau plaf à 1350 m, avec en prime, la formation du nuage juste autour de moi. Je ne suis plus en retard.Et j’enchaine donc directement en délaissant les thermiques inférieurs à 2m/s. Nouveau plafond à 1400 m, encore sous le nuage, près de 65 km de parcours, record personnel battu. Je commence à me dire que les 100 km sont possibles car il n’est que 14h et la masse d’air évolue en se bonifiant.
Arrivé à la hauteur d’une forêt entre Ernée et Laval, plus aucune barbule ne se forme, je n’arrive plus à monter correctement, nouvelle temporisation, je tourne en rond en attendant un signe devant. Au loin, il y a bien des cumulus mais ils sont à une vingtaine de kilomètres, inatteignables. Petit plafond à 1200 m au kilomètre 87, juste avant Laval. Je me dis que les 100 km sont atteignables, je me jette dans le bleu…
Kilomètre 92, point bas du vol à moins de 600 m, les 100 km s’envolent, je me reconcentre et laisse la voile glisser vers un nouveau thermique qui me remonte à 800 m dans un premier temps, puis je me replace sous un nuage qui vient d’apparaître et je remonte à 1250 m. Juste après ce plafond, je passe mes premiers 100 km, il est environ 15:30.
4ème phase
Je profite de la prochaine transition pour informer ma compagne, que ma soirée d’anniversaire de ce soir risque d’être compromise et qu’une photo pourrait largement me remplacer. Je raccroche en la laissant essayer d’organiser les choses, merci chérie !
J’enchaîne encore 2 thermiques, mais non ce n’est pas raisonnable, j’en suis à presque 120km.Même si la masse d’air est encore très bonne et facile, je suis fatigué, j’ai faim, je me dirige donc vers le village le plus proche, je zoome sur ma carte : Ballots. Je ne vais quand même pas poser à Ballots… ça serait…
En arrivant au-dessus de Ballots, il y a un lac à quelques kilomètres, en me rapprochant, je vois des câbles, puis des wakeboarders et quelques voitures sur le parking. La solidarité entre rideurs devrait fonctionner. Arrivé au-dessus du parking, je vois un autre parking avec une centaine de voitures sous les arbres plus loin vers le centre du lac, finalement, je délaisse les rideurs, une croix est dessinée au centre de la pelouse, c’est un signe : ici s’arrête mon périple. Entre-temps, juste avant de poser, nouvel appel de l’assistance : une voiture part me chercher via l’A84, il faudrait donc essayer de remonter le plus possible vers cette autoroute.
Suite à l’atterrissage un défilé des badauds, à qui je demande s’ ils n’ont pas une place dans leur voiture. Finalement, en me positionnant à la sortie du parking de l’Etang de la Rincerie, la plupart des gens s’arrêtent, j’arrive donc, après quelques minutes, à trouver une voiture pour me déposer à une quinzaine de kilomètres de là, en direction de Vitré.
Je serai ensuite pris par une seconde voiture qui me déposera au nord de Vitré, et enfin une 3ème voiture me déposera au sud de Fougères où attend ma dulcinée avec la voiture de ma belle-mère préférée.
Retour à la maison à 19h30, la soirée peut commencer, il n’y aura pas de photo à ma place cette année !Premier cross posé dans une autre région, 125km en ligne droite, 4h40 de vol, un beau cadeau d’anniversaire !
Prochain objectif, refaire ce vol en groupe et valider tout ça pour assimiler que ce n’était pas de la chance mais bien des compétences qui se mettent en place petit à petit !
Un grand merci à Vladimir Rogoff pour nous avoir partagé son aventure. Si vous aussi vous souhaitez partager votre aventure et votre expérience, envoyez-nous votre histoire à communaute@parapentemania.fr.